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Service de presse
1. Points positifs ? Les faux semblants de la nouvelle loi
3. L'asile, un domaine de non droit

Service de presse N° 3 - 11 mai 1999

Suspension de la procédure :
versions divergentes en français et en allemand

Aussi incroyable que cela paraisse, la disposition la plus controversée de la nouvelle loi sur l'asile, l'article 69, qui règle l'octroi de la protection provisoire et la suspension de la procédure d'asile, a été discuté aux Chambres fédérales et adopté au vote final selon deux versions divergentes entre le texte allemand et le texte français. Signalée par le comité référendaire Asile.ch, cette erreur sera corrigée, selon la version plus restrictive du texte allemand, dans la brochure distribuée aux électeurs de langue française.

Selon la version française de la loi qui a été soumise au vote final des Chambres et publiée dans la Feuille fédérale (FF 1998 3109), l'article 69 prévoit la protection provisoire et la suspension de la procédure d'asile pour tous les membres du groupe « en l'absence manifeste d'une persécution au sens de l'article 3 ». Cette mesure ne s'appliquerait donc que si l'on a la certitude que la personne concernée n'a aucune chance d'obtenir l'asile.

La version en allemand et la lecture des débats débouchent par contre sur une conception beaucoup plus rigoureuse du carcan juridique dans lequel vont se retrouver enfermés les réfugiés venant de pays en guerre, même si certains d'entre eux ont été victimes de persécutions politiques individuelles. La formulation allemand prévoit en effet la protection collective « Lorsqu'il n'y a pas manifestement persécution » (« Liegt nicht offensichtlich eine Verfolgung » - cf. BBl 1998 3525). La condition est ici inversée. Il faudrait qu'une persécution au sens de l'article 3, c'est à dire un cas d'asile, soit manifeste pour que l'intéressé échappe au statut précaire et à la suspension de la procédure.

Des cas d'asile admis comme manifestes par l'ODR dès l'enregistrement et avant même toute mesure d'instruction, on peut en chercher longtemps : ils se comptent sur les doigts d'une main. En pratique, cette clause ne s'appliquera qu'à cas très particuliers ou pour des contingents sélectionnés à l'étrangers et autorisés à venir en Suisse dans le cadre d'une action spéciale. Pour tous les autres, l'asile sera rendu inaccessible, quelle que soit la gravité des persécutions subie. Seul un droit de recours, que n'auraient exercé qu'une minorité de réfugiés, comme cela a été le cas pour les Bosniaques, aurait permis de concilier le voeux d'une procédure collective simplifiée et le respect des droits individuels. En l'excluant expressément, les Chambres ont bien montré qu'elles faisaient peu de cas des « vrais » réfugiés.

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